LA SDN ET L’ONU : STRUCTURES ET MOYENS (II)

Publié le par sylvainaltazin

B) Structures organisationnelles et fonctionnement des Nations Unies.

 

1. Composition

 

L’Organisation est composée d’Etats et ceux-ci sont représentés au sein des organes. 50 Etats étaient présents lors de la Conférence de San Francisco (51 membres fondateurs). Au cours de l’année 1955, l’Organisation est passée de 60 à 76 membres. Fin 1976, l’ONU comptait 147 membres. Fin 2002, le Timor oriental est devenu le 191ème Etat membre. Chaque Etat désigne des délégués qui le représente au sein des organes où il a un siège. Les Etats tiers sont liés par les grands principes inclus dans la Charte, mais cela ne crée aucune obligation juridique. Ces Etats, les organisations internationales (comprenant des entités telles que la Communauté européenne ou la CEI), les ONG, ou bien les mouvements de libération nationale peuvent se voir reconnaître le statut d’observateur.

 

2. Structure et moyens des organes

 

Le système onusien, à la fois original et complexe, se compose d’organes principaux et d’organes subsidiaires.

 

a) Les organes principaux

 

  • L’Assemblée générale

 

C’est l’organe délibérant par excellence. Sa composition repose sur le principe de l’égalité juridique des Etats. Et en cela, elle est le seule organe plénier de l’Organisation puisque tous les Etats membres des Nations Unies. De plus chacun d’eux ne dispose que d’une seule voix lors des votes. Ses travaux sont organisés en sessions : sessions ordinaires qui ont lieu une fois par an ; et sessions extraordinaires (la Palestine, la crise de Suez, la crise au Congo, l’intervention soviétique en Afghanistan, le désarmement, l’apartheid, l’environnement, etc.) convoquées à la demande du Conseil de sécurité ou bien de la majorité des membres des Nations Unies. L’Assemblée bénéficie d’une sorte de compétence générale puisqu’elle « peut discuter toutes questions ou affaires rentrant dans le cadre de la Charte ». Elle partage, en outre,  avec le Conseil de sécurité le pouvoir de « discuter toutes questions se rattachant au maintien de la paix et de la sécurité internationales ». Elle fait aussi des recommandations en vue de développer la coopération internationale dans les domaines politique, économique, social, culturel et en vue de promouvoir les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Elle vote, enfin, le budget de l’ONU, chaque année. A l’égard des Etats membres, l’Assemblée n’émet que des recommandations, actes sans valeur obligatoire. En revanche, dans l’ordre interne de l’Organisation, l’Assemblée générale peut prendre de véritables décisions (admission d’un nouveau membre, vote du budget[1], création d’un organe subsidiaire).

 

  • Le Conseil de sécurité

 

Il s’agit du deuxième organe principal de l’ONU. Il possède « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales ». De cette responsabilité se déduisent des attributions spécifiques pour le règlement pacifique des différends, prévenir les menaces contre la paix, les ruptures de la paix et lutter contre tout acte d’agression, autoriser et contrôler les actions coercitives de organisations régionales, ou pour utiliser dans l’application des mesures coercitives qu’il a prises. Quinze Etat membres y sont représentés. Ces derniers se divisent en deux catégories : les Etats membres, au nombre de cinq et disposant d’un droit de veto (Etats-Unis, Royaume-Uni, Russie, France, Chine), et les membres non permanents, élus pour deux ans par l’Assemblée générale et renouvelés par moitié chaque année. Le Conseil de sécurité est le seul organe de l’ONU qui puisse adopter des résolutions, véritables décisions obligatoires pour les Etats membres, mais il s’agit le plus souvent par voie de recommandations.

 

  • Le Conseil économique et social

 

Organe principal chargé de coordonner les activités économiques et sociales de l’ONU, et de ses institutions spécialisées, il est composé de 54 membres élus par l’Assemblée générale pour trois ans et renouvelés par tiers chaque année. Il tient plusieurs sessions par an. Mais tout au long de l’année il exerce ses activités à travers des organes subsidiaires, des commissions et des comités, qu’il est habilité à créer. Le Conseil économique et social est un organe consultatif qui réalise des études et rapports sur les problèmes économiques, sociaux, et la protection des droits de l’homme. Il adresse des recommandations à l’Assemblée générale, aux Etats membres et aux institutions spécialisées intéressées avec lesquelles il est en étroite relation. Il prépare des projets de convention pour les soumettre à l’Assemblée. Il informe et assiste le Conseil de sécurité.

 

  • Le conseil de tutelle

 

Ayant cessé son activité depuis l’accession à l’indépendance en 1994 des îles Palaos, dernier territoire sous tutelle, il était chargé de surveiller l’administration des territoires sous tutelle.

  • La Cour internationale de Justice

 

« Organe judiciaire principal des Nations Unies » dont le siège est à La Haye, la Cour est composée de quinze juges élus pour neuf ans et rééligibles. Les juges doivent assurer, « dans l’ensemble, la représentation des grandes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques du monde » et jouissent d’une certaine indépendance par rapport à leur Etat d’origine. Ils ne sauraient par conséquent recevoir d’instructions de leur gouvernement respectif. Aussi doivent-ils faire le serment de leur impartialité. La CIJ a une fonction contentieuse (consistant à trancher des conflits dans lesquels les Etats se contestent réciproquement un droit) et une fonction consultative (elle en peut être saisie que par des organisations internationales), celle-ci n’ayant pas de portée juridictionnelle.





[1] Le budget de fonctionnement de l’Organisation est d’environ 2 milliards de dollars (dont plus de 25% proviennent des seuls Etats-Unis). Celui des opérations de maintien de la paix avoisinait les 4 milliards de dollars en 1995.


  • Le Secrétariat

 

Le Secrétariat est composé du personnel que peut exiger l’Organisation et d’un Secrétaire général. Ce dernier, qualifié par la Charte de « plus haut fonctionnaire de l’Organisation », est nommé par l’Assemblée générale sur recommandation de Conseil de sécurité pour cinq ans renouvelables. Le Secrétaire général assume des fonctions administratives en sa qualité de chef du Secrétariat général (gestion du personnel, préparation du budget, enregistrement et publication des traités). Mais il est surtout amené à jouer un rôle notable, le plus symbolique et médiatique qu’effectif, dans la politique internationale. Les secrétaires généraux, depuis la création de l’ONU sont Trygue Lie (1946-1952), Norvégien ; Dag Hammarksjöld (1953-1961), Suédois ; U Thant (1961-1971), Birman ; Kurt Waldheim (1972-1981), autrichien ; Javiez Perez de Cuellar (1982-1991), Péruvien ; Boutros Boutros-Ghali (1992-1996) ; Kofi Annan (1996). Ils peuvent être amenés à jouer un rôle important dans le règlement pacifique des différends en facilitant par son intervention une solution négociée. Kofi Annan a par exemple obtenu la conclusion de l’accord de Bagdad en 1998. 

 

b) Les organes subsidiaires

 

Ils sont en principe constitués par les organes principaux et sont dépourvus d’autonomie administrative et budgétaire. Leur importance est notable comme suffit à l’illustrer notamment la Commission du droit international, le Tribunal administratif des Nations Unies, le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, le Tribunal pénal international pour le Rwanda, etc. Etant donné l’envergure de leurs activités, certains organes subsidiaires ont changé de statut en se transformant en institutions spécialisées.

 

c) Institutions spécialisées

 

Elles sont regroupées dans « le système des Nations Unies », expression qui suggère bien l’ambition onusienne de coordination de ces institutions dont les activités couvrent tous les aspects techniques et culturels de la vie sociale. Chaque institution est en effet rattachée à l’Organisation sur la base d’un accord qui permet de coordonner leurs activités. Ces institutions, dont un certain nombre existaient avant la création de l’ONU demeurent très variées : l’Organisation internationale du travail (OIT), l’Organisation pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les organisations dites de Bretton Woods (FMI, BIRD, SFI, AID), etc.

 

C) Conclusion

 

Il paraît essentiel de souligner que l’ONU, élément très modeste de l’ensemble complexe au sein des relations internationales, n’est pas un acteur indépendant sur la scène politique, contrairement à ce que prétendent les médias et laissent entendre certains hommes politiques pour ne pas endosser la responsabilité de décisions qui ne dépendent que d’eux-mêmes (tel François Mitterrand déclarant le 20 juin 1991, pour expliquer son engagement dans la guerre du golfe, que la France y était présente « en raison des décisions du Conseil de sécurité »). L’ONU est en fait essentiellement le Conseil de sécurité, où les Etats-Unis et les grandes puissances font la loi et où aucun membre permanents (dont la France) ne peut être lié par une décision qu’il n’aurait pas expressément approuvée, et le secrétaire général qui ne peut prendre aucune décision politique sans l’accord du Conseil et qui dispose seulement de quelque autorité en matière de gestion.

Dans le domaine du développement et de l’assistance humanitaire et par le biais du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR), du Programme alimentaire mondial (PAM), du Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) ou encore du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’action de l’ONU s’avère parfois très utile. Il s’agit cependant d’action devant faire face à des actions urgentes et locales. Des millions d’enfants continuent d’être utilisés comme travailleurs, la pauvreté et la misère s’accroissent dans les bidonvilles d’immenses métropoles. Et l’ONU, loin d’avoir enrayé les inégalités à travers le monde sert plus de pansement que de remède. Les firmes internationales ou multinationales, les ONG, les relations diplomatiques bilatérales, les sommets ou autres alliances militaires

Dans le domaine de la sécurité et du maintien de la paix, on dénombre plus d’échecs (Angola, Chypre, Sahara occidental, Afghanistan, Yougoslavie, Haïti, Rwanda, etc.) que de succès, souvent précaires d’ailleurs (Namibie, El Savador, Cambodge, etc.). D’autant qu’il arrive fréquemment que les problèmes sont renvoyés à l’ONU dès lors qu’ils apparaissent comme insolubles : le cas du conflit israélo-palestinien (1947-1951) dont a voulu se décharger le Royaume-Uni est tout à fait typique.

 

 


CONCLUSION GENERALE

 

Appréhender l’efficacité des  de la SDN et de l’ONU nécessite de s’interroger sur les fins et les faits. Transcender le verbalisme pour le réalisme. Toute organisation internationale n’a pour compétences que celles que ses Etats membres lui ont attribuées. Là, essentiellement, se situe l’Tantôt assurant le maintien de l’ordre établit ou exécuteur des décisions des grands (et, en particulier, des Etats-Unis), synonymes de succès, parfois, mais le plus souvent en tant qu’instrument des puissances, l’ONU, si elle succède à la SDN et parvient à plus de crédibilité que la précédente (du fait d’une grande médiatisation, de moyens et de structures plus efficaces) est loin d’avoir répondu aux rêves que l’on avait construit autour d’elle. L’une des explications est sans doute qu’il n’y a jamais eu, en matière de paix, le pendant de Clausewitz. La faiblesse des idées sur la paix et la quasi absence de production sur les techniques qui pourraient permettre d’établir la paix témoignent plus que jamais d’un intérêt plus grand, parce que plus « jouissif », plus « facile » voire plus « naturel » pour la guerre. Dès lors, en matière de moyens et de structures, on peut rêver d’une ONU qui serait la première puissance économique et militaire du monde, et d’un Koffi Anan devant qui se prosternerait Bush et Ben Laden, les intérêts égoïstes des banques et des actionnaires…

 

 


Bibliographie

 

La Société des Nations, Michel Marbeau, Que sais-je ?

L’ONU, Maurice Bertrand, collection Repères

L’ONU, Frédérique Mestre-Lafay, Que-sais-je ?

Le Mythe des Nations Unies, l’ONU après la guerre froide, Pierre-Edouard Deldique, Hachette livre


Publié dans HOMO-POLITICUS

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article