La Constitution De La IIIème République (I)

Publié le par sylvainaltazin

I. La « Constitution » de la IIIe République

 

Il n’y a pas à proprement de Constitution de 1875 mais trois lois constitutionnelles. Faute de consensus et d’accord global sur la nature du régime et de ses principes, on ne trouve nulle trace comme dans les précédentes Constitutions de textes « fondateurs », préambule ou déclaration indiquant l’inclination générale et la source intellectuelle des lois fondamentales. Ces lois constitutionnelles, compromis fragile et susceptible d’évoluer, ne pourront être modifiées que sur l’initiative de Mac-Mahon, président de la République (avec le contre-seing du Gouvernement). La décision de réviser est prise par la Chambre des députés et le Sénat statuant séparément par le vote d’une résolution définissant la révision. Si les deux résolutions votées sont identiques, la révision elle-même est faite par les deux chambres réunies, cette fois, en Congrès. Et pour en arriver à cette solution, il aura fallu cinq années durant lesquelles la République se cherche, avant de s’établir bientôt solidement.

 

A. Naissance de la IIIe République

 

Napoléon III a capitulé à Sedan le 2 septembre 1870. Un Gouvernement de la Défense nationale se forme le 4 à paris, proclame la République et devra, le 28 janvier 1871 signer une convention d’armistice avec l’Allemagne. Les élections de février 1871 au suffrage universel marque l’avènement d’une forte majorité monarchiste. Thiers est désigné chef du pouvoir exécutif de la République française, en attendant qu’il soit statué sur les institutions de la France. Il gouverne, nomme les ministres et préside le conseil. Mais il gouverne sous l’autorité de l’Assemblée.

Tandis que l’insurrection patriotique de la Commune de Paris est réprimée avec violence, le régime organise le provisoire.

 

1. La « Constitution Rivet » du 31 août 1871

 

Sur la proposition d’un député, Rivet, l’assemblée confère le titre de président de la République à Thiers, dans l’attente d’institutions définitives. Le président est responsable devant l’Assemblée et le Conseil des ministres et les ministres sont responsables devant l’Assemblée. Chacun des actes du président doit être contresigné par un ministre. Il est difficile de mettre en œuvre un système de double responsabilité, celle du président l’emportant nécessairement dont, le précédent de 1848 l’avait montré, est source de conflits.

 

2. La « loi chinoise » du 13 mars 1873

 

Dans un message de novembre 1872, Thiers demande à ce que la Constitution provisoire soit précisé. C’est l’objet de la loi Broglie, en mars 1873, qui vise à rendre difficiles les interventions personnelles de Thiers à l’Assemblée, celui-ci s’étant prononcé en faveur d’une République conservatrice. Mis en minorité, le Gouvernement se retire et Thiers démissionne. Elu président de la République (mai), Mac-Mahon, légitimiste mais aussi piètre orateur, va se comporter de chef de l’Etat irresponsable d’un régime parlementaire laissant au vice-président du Conseil, Broglie, la conduite des affaires. En novembre 1873, les monarchistes vont proroger pour sept ans les pouvoirs de Mac-Mahon avec le titre de président de la République.

 


B. Les lois constitutionnelles de 1875

 

1. L’élaboration

 

a) République ou monarchie ?

 

L’amendement Wallon est voté en janvier 1875 : « Le président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale. Il est nommé pour sept ans. Il est rééligible. »

Les scrutins suivants confirment le caractère impersonnel du mandat et des pouvoirs du président de la République, un nouvel amendement subordonnant le droit de dissolution de la chambre par le président à l’avis conforme du Sénat.

 

b) Le débat sur le Sénat

 

La loi sur le Sénat précise que les sénateurs seront élu par des collèges rassemblant les députés, un délégué par commune, conseillers d’arrondissement et conseillers généraux désignés, un quart d’inamovibles élus d’abord par l’Assemblée, puis par le Sénat.

 

2. Le président de la République

 

Son mode d’élection par les chambres lui donne une légitimité restreinte. Le président élu pour sept ans, irresponsable, a certes les pouvoirs d’une sorte de monarque constitutionnel. Il a le droit de grâce, celui de conclure les traités, l’initiative des lois qu’il partage. Avec les lois qu’il partage avec les chambres, peut proroger et clore leurs sessions après cinq mois de session ordinaire, dissoudre la Chambre des députés avec l’avis conforme du Sénat. Il nomme les ministres mais le fait avec le contreseing d’un membre du Cabinet démissionnaire, généralement le président du Conseil démissionnaire.

 

3. Le Gouvernement

 

a) Le chef du gouvernement

 

Le Gouvernement est responsable collectivement devant les chambres de la politique générale et les ministres individuellement de leurs actes personnels. Qui dirige ce Gouvernement ?  Sur ce point les lois constitutionnelles sont muettes. Est-ce le président de la République ? Il préside normalement le Conseil des ministres. L’homme chargé de former le Gouvernement, porte simplement le titre de vice-président du Conseil des ministres. Or, à l’entrée en vigueur de la Constitution, Mac-Mahon, chef de l’Etat nomme, après l’avoir chargé de constituer un Gouvernement, un président du « conseil des ministres ». On a ainsi voulu marquer par ce changement que le président de la République était devenu politiquement irresponsable. Dès lors, l’usage confèrera au chef de Gouvernement le titre de président du Conseil  alors qu’en fait c’est le chef de l’Etat qui préside le conseil des ministres, le chef de Gouvernement présidant seulement les conseils de Cabinet, hors de la présence du président de la République.

 

b) La responsabilité devant le Sénat

 

La question de savoir si le Gouvernement est responsable effectivement devant le Sénat fut sujet à interprétation. Le Gouvernement est-il responsable devant chacune des chambres ? La pratique tranchera la question. Sept gouvernements seront renversés par le Sénat de 1876 à 1940.

 

4. La Parlement

Le Parlement est composé de deux chambres, une Chambre des députés élue au suffrage universel direct, et un S. La Haute Assemblée doit faire pendant à la première. Le collège électoral des sénateurs est très largement celui de la France rurale. Un quart des membres du Sénat sont nommés à vie par L’Assemblée. Le Sénat, renouvelé par tiers tous les trois ans et, contrairement à la Chambre des députés, ne peut être dissous, exerce un pouvoir conservateur. Les lois sont votées avec l’accord des deux chambres, ce qui place dans une stricte égalité le Sénat et la Chambre des députés  dans le processus législatif. Seules les lois de finances doivent être présentées d’abord à la Chambre des députés.

 

5. Une Constitution « orléaniste » ?

 

Le compromis de 1875 adopte la forme républicaine et une structure des pouvoirs étayés par un monarque constitutionnel et le Gouvernement parlementaire. Constitution’est dans ce sens qu’elle est d’inspiration orléaniste (mais ayant achevé sa mue parlementaire, acclimatée au suffrage universel et dans lequel le roi règne mais ne gouverne pas).

 


Publié dans HOMO-POLITICUS

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